Parcours

Biographie

Extraite du livre Fanch Vidament.
Ecrite par Olivier Levasseur.

François Vidament naît le 13 juin 1948 à Sainte-Barbe en Kérity. Enfant, il peint déjà et rêve de faire les Beaux-Arts. Devant les réticences de ses parents, il intègre le lycée Du Vau-Meno à Saint-Brieuc afin de préparer un diplôme de commis d’architecte. Les cours de dessin sont pour lui une confirmation de son intérêt pour la peinture. Adolescent, il rencontre le peintre paimpolais Alain le Nost et est bouleversé par sa peinture tourmentée. Le Nost aura une influence certaine sur les premières œuvres de Fanch Vidament et l’encouragera à ses débuts. Alors lycéen, il remporte un prix pour une affiche à l’occasion d’un concours organisé par le comité des Côtes du Nord de lutte contre la faim.

Tous droits réservés

Sa première exposition date de 1969. Il expose en compagnie de d’Yves Dagorn et d’André Douet à la salle des jeunes de Plouézec. Deux de ses œuvres de grand format – des portraits – sont alors remarquées. L’année suivante il expose dans sa ville natale. Cette fois encore, ce sont ces portraits, dont « le rêve » qui retiennent l’attention. Il rencontre à la même époque Glenmor (1931-1996), à qui il rend visite dans son manoir de Glomel, et qui lui fait découvrir une Bretagne plus rude, plus terrienne, mais aussi humainement plus chaleureuse. C’est à Pont-Cadic en Saint-Servais (22) qu’il va s’établir comme exploitant agricole, produisant notamment des fromages de chèvre qu’il vend sur les marchés de la région ainsi qu’aux restaurants de la région paimpolaise.

Tous droits réservés

« Peintre-paysan », l’expression revient sans cesse dans les comptes-rendus d’exposition, à tel point que cela devient sa marque de fabrique. Fanch Vidament lui-même accepte volontiers ce qualificatif estimant ne privilégier ni l’une ou l’autre de ses activités. Il est paysan parce que cela lui procure les revenus indispensables à faire vivre sa famille, mais il est peintre car cela lui est nécessaire. Il n’hésite pas, lorsque survient l’inspiration, à descendre de son tracteur pour s’exprimer sur la toile. De la même manière, il peint parfois en pleine nuit. Il se réclame de peintres habités comme Vincent Van Gogh, Paul Gauguin ou Amédéo Modigliani. Sa peinture présente parfois une parenté certaine avec celles de l’expressionniste flamand Constant Permeke qu’il ne découvre pourtant qu’à la fin de sa vie.

Sa première exposition personnelle intervient en 1971 à la MJC du plateau de Saint-Brieuc. Il présente alors une vingtaine de toiles au public. Les thèmes qui le retiendront sa vie durant sont déjà en place : des portraits, des couples, des familles paysannes, mais aussi des paysages bretons de Haute Cornouaille ou du littoral costarmoricain. Sa palette est déjà en place, privilégiant les ocres et les jaunes, terre de sienne ou grenat mais aussi les bleus, souvent profonds. Même si les bords de mer lui donnent l’occasion de prouver son talent, la peinture de Fanch Vidament est profondément « terrienne », proposant une interprétation très personnelle du monde qui l’entoure : quand on regarde mes toiles, je veux que l’on ressente la chaleur du printemps, la douceur de l’automne ou le froid de l’hiver ; je veux que l’on perçoive les odeurs… Très attaché à sa région il réalise des affiches pour des festoù-noz ou d’autres événements locaux. Il peint également une fresque (disparue depuis) dans un café-concert de sa commune ainsi qu’une autre chez des amis. Si ses premières œuvres peuvent paraître tourmentées, son style va évoluer au fil des ans vers plus de sérénité, vers plus de lumière.

« Quand on regarde mes toiles, je veux que l’on ressente la chaleur du printemps, la douceur de l’automne ou le froid de l’hiver ; je veux que l’on perçoive les odeurs…« 

Fanch Vidament

L’élan brisé net. Le début des années 1980 marque pour Fanch Vidament un indéniable décollage de sa carrière. À partir de cette date, les expositions se multiplient en Bretagne (Brest, Lorient, Dinard, Pont-Aven, Trébeurden, Paimpol, Saint-Malo…) La critique lui est favorable, et le public le reconnaît. Il confie en 1981 au journaliste André Legrand que son œuvre n’intéressait pas les gens maintenant ça commence à venir. Il rêve alors de sculpter et sa peinture s’en ressent : les formes sont de plus en plus dépouillées et le chemin vers l’abstraction le menait vers la sculpture, disait-il.
Au cours de l’hiver 1980, il se rend en famille à Belle-Ile-en-Mer, noircissant des carnets de croquis à l’encre de Chine, représentant des hameaux ou le petit port de Sauzon. À la même époque, il concourt pour une campagne d’affiches pour Amnesty international. Au début de l’année 1982, il participe, au collège de Lanvignec de Paimpol, à une expérience pédagogique innovante. Contacté par le principal de l’établissement, il accepte avec enthousiasme, déclarant alors que parler de peinture dans les écoles, ça c’est important. Tout autant que d’enseigner le français ou les mathématiques. Cette immersion en milieu scolaire lui donne également l’occasion de nous fournir des précisions sur la manière dont il travaille. Questionné à propos des maisons « qui semble vouloir se toucher » que l’on repère dans de nombreux tableaux, Fanch Vidament répond qu’une maison ça vit, ça n’est pas figé. Une maison où l’on fait de la musique n’a rien à voir avec celle où l’on pleure. Par ma peinture, je veux exprimer des impressions pour vous donner un exemple plus précis, je dirais que l’on doit parvenir à faire du bruit avec de la peinture. (…)Si je peignais une moto, je considérerais avoir atteint mon but si vous l’entendiez pétarader en la regardant. Sa peinture ne saurait être qualifiée de passéiste, car elle prend sa source d’inspiration dans sa vie quotidienne, à propos de laquelle il apporte un témoignage, considérant qu‘on est entouré de choses extrêmement belles et il faut faire un effort pour les conserver. (…) Bien que profondément pessimiste, je considère qu’il est important de montrer que le monde pourrait être autrement.

Tous droit réservés

Un projet d’exposition itinérante en Italie, en Belgique et en Irlande est mis sur pied mais n’aboutit pas faute de temps. Dans les derniers mois de sa vie, le besoin impérieux de peindre le taraude de plus en plus et il décide de réduire ses activités agricoles afin de se consacrer à son art et de s’occuper de ses enfants. Il installe dans son atelier un petit chevalet pour sa fille Anjela qui peint souvent avec lui et attend avec impatience la naissance de sa seconde fille. Fanch Vidament décède brutalement le 11 novembre 1982 agé de 34 ans seulement ; sa fille Elisa naît le 11 décembre 1982, un mois jour pour jour après son décès.

Au cours de sa brève carrière entre 1969 et 1982, Fanch Vidament aura peint environ 300 œuvres, et participé à une quarantaine d’expositions, collectives pour la plupart. Il laisse une œuvre unique, forte et originale. Glenmor rendra d’ailleurs hommage à celui qu’il décrivait comme un « marchand de rêve » : Vidament fait de nous les spectateurs d’un théâtre où le décor dit l’essentiel (…) Je ne puis contempler une seule toile de ce paysan, de ce paysan qui vécut tel par amour de la terre et de ceux qui en vivent, sans me voir flâner le long de ses chemins sans m’asseoir au milieu du village, y voir renaître les chansons, les rires et les pleurs par ces temps d’abandon . (…) Le monde de Fanch Vidament est un monde éclaté où tout un chacun peut accrocher ses soleils et son nuage…